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DOLLYBAO
7 août 2004

Ivon du Dutch.

 

Dimanche 8 août 2004.

 

 

Amis Dominicaux, Missi Dominici, mes si chers commensaux, comment ça va ?

Aujourd'hui dimanche, souffrez que cette chronique soit plus courte qu'à l'accoutumée. En règle générale, le 7ème jour, je fais ce que le Très Haut nous dit de faire, je me repose.

 

Cela étant, j'ai ce matin appris une nouvelle qui m'a prêté à rire, et l'envie de vous la faire partager est plus forte que le respect que je porte aux injonctions bibliques, puisse le Seigneur pardonner mes offenses etc.

 

Ce matin, donc, je parcourais négligemment le Parisien Dimanche, accoudé au comptoir d'un estaminet de la rue Mon-Orgueil, bien connue pour son défilé permanent de poseurs en tout genre, je sirotais un robusta dégueulasse et hors de prix, mais il y a autant de cafés ouverts les dimanches matin du mois d'août dans le centre de Paris que de doigts à la main du Baron Empain.

 

Je conseille vivement à tous la lecture du Parisien : pour peu que vous n'exprimiez qu'une ferveur mitigée pour le ballon rond et les sports hippiques, voilà un quotidien qui se torche en 8 minutes, mots fléchés compris. Une espèce de Reader's Digest de l'information, en quelque sorte.

 

Au détour de la sempiternelle rubrique des scooters renversés et des mémères éviscérées, blotti contre un article sur les arnaques des campings, cette petite perle dont je vous livre un aperçu expurgé des pollutions journalistiques coutumières :

Von Dutch, la marque à la mode en Ile-de-France.

LA SCÈNE se passe il y a quelques jours dans une cité de Seine-Saint-Denis. Les douaniers surveillent plusieurs personnes qu'ils soupçonnent de trafic de drogue. Au milieu de la nuit, une deuxième voiture rejoint le groupe.

Les coffres s'ouvrent. Des paquets s'échangent. De la cocaïne, à coup sûr. Les douaniers surgissent, arme au poing. Stupéfaits, ils découvrent qu'il s'agit de faux tee-shirts de la marque Von Dutch.

Lancé en France il y a moins d'un an grâce au soutien de Johnny Hallyday […] Von Dutch est aujourd'hui en passe de créer un phénomène de société sans précédent [...] Mais cette soudaine explosion des ventes s'est accompagnée d'un extraordinaire développement de la contrefaçon du produit. « C'est bien simple, il s'agit du modèle le plus contrefait du moment, résume un douanier. Et c'est bien la première fois qu'une marque en est aussi rapidement victime. » […] « Le problème, […], c'est que les Von Dutch contrefaits se vendent quasiment au même prix que les vrais. 40 € pour une casquette au lieu de 50. Résultat, les victimes pensent acquérir le produit original […] Certains commerçants peuvent ainsi être abusés de bonne foi. « On est venu me signaler que les vêtements que je vendais étaient des faux, confie une commerçante du XVIème arrondissement de Paris. La société qui me les avait vendus avait pu me fournir des factures en règle. » .

Cet article est amusant à plus d'un titre. Vous me permettrez d'être quelque peu grinçant envers Von Dutch, mais j'ai certaines rancoeurs tenaces à l'égard de cette enseigne de Prêt-à-frimer.

Premièrement, j'ai horreur des phénomènes dits « de mode », et la perspective de me transformer un placard publicitaire ambulant n'a jamais eu la faveur de mes suffrages.          

Ensuite, Von Dutch mérite le respect dû à sa mémoire : celle d'un Pinstripper génial, dont les décorations apposées sur les customs autos et motos des années 50 à 70 ont bercé mon enfance de lecteur de Nitro. C'était peut-être un vieil hippie, un clochard céleste alcoolique et facho, mais son talent en tant que designer est incomparable avec les bouts de chiffons proposés par la marque éponyme. Déterrer des cadavres pour faire du fric, trahir le nom et la pensée d'un homme, voilà un vilenie à laquelle je n'apporterais jamais ma caution, et encore moins mes sous.

Tertio, ces sagouins de la fripe viennent d'ouvrir une boutique Place des Victoires, saccageant la perspective historique de ce haut lieu du classicisme architectural Français, et offrant au pauvre Roi Soleil, perché sur son canasson de bronze, le spectacle désolant d'une vitrine bariolée de couleurs agressives, barrée d'un Von Dutch diagonal de 2 mètres de haut. A vomir sans modération.

Cependant, au-delà des ces griefs, je trouve la mésaventure de Von Dutch amusante, et notamment le splendide coup de marketing consistant à vendre les copies un poil en deçà du prix officiel pour en justifier l'authenticité. C'est absolument imparable et assurément rémunérateur. Considérant le QI moyen d'un client Von Dutch, mu par un insatiable appétit grégaire et un conformisme affligeant, les petits malins de Saint-Ouen et de Clignancourt devraient rapidement amasser suffisamment de fric pour se payer le même Hummer à vitres noires que celui que le patron de Von Dutch France laisse ostensiblement traîner en face de sa boutique, sans doute pour souiller un peu plus l'endroit en y apportant sa touche « Guerre du Golfe II » de la dernière élégance en cette place dédiée aux triomphes militaires de notre grand Louis.

Cela étant, chers amis, si vous étiez tentés par un superbe casquette de pompiste à 40 euros, de celles que l'on n'ose habituellement accepter lorsqu'elles sont offertes chez Total, n'hésitez pas ! Ruez vous sur la contrefaçon ! A quarante euros, dans le pire des cas, vous êtes gagnants, car ces contrefaçons sortent généralement des mêmes usines est asiatiques que les couvre-chefs certifiés Fashion Victim. Plus généralement, vous vous ferez une bonne affaire en héritant d'une copie fabriquée au Maroc, de meilleure qualité que les « Originals ».                    

Bref, camelote pour camelote, autant encourager le petit commerce des rues.

Lequel, faisant une fois de plus montre d'une adaptation « stupéfiante » aux évolutions du marché, s'est d'ores et déjà converti.

Hier soir, rentrant d'un pique-nique au Pont des Arts avec une superbe brune mégalochée que je m'étais mis en tête de traire, je traversais le jardin des Halles, bien connu la nuit venue des adolescents en quête de mélange cirage/henné à 50 euros le gramme pour se coller la migraine, lorsqu'un individu d'un beau noir d'ébène susurra à mes oreilles :

« Pssst, Man, tu veux du Dutch ? ».

                            

 

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Commentaires
M
Psst, Man, on en veux plus ! <br /> Quel talent ! si j'ai juste une critique à formuler ... ne change rien c'est parfait.<br /> Le ton est donné ... l'accoutumance me guette (j'attends fébrilement tous les matins une nouvelle du jour et ce n'est pas suffisant, il me faut une dose plus forte, c'est grave docteur ?)<br />
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